Visite d'une cave de Champagne
Etant un enfant de la région du Champenois, j’ai déjà eu l’occasion de visiter des producteurs de Champagne que ce soit du plus modeste au plus gros. Cela dit, n’étant plus dans la région, cela faisait longtemps que je n’avais pas pratiqué ce genre de visite, et ce fut chose faite récemment. Voici un petit reportage photo.
Sans préférence pour qui que ce soit, j’ai donc fait la visite des caves de Taittinger, un des gros producteurs installés à Reims dont l’emplacement possède quelques particularités historiques fort intéressantes.
Les locaux de la maison Taittinger sont en partie situés à l’endroit où se trouvait l’ancienne église Saint-Nicaise de Reims. Celle-ci fut vendue comme bien national en 1783 et progressivement démolie jusqu’à sa disparition complète au XIXème siècle. Ainsi, la galerie de caves où le producteur entrepose ses bouteilles est héritée d’une partie des fondations de cette ancienne église, et certains tunnels datent même de l’ère romaine puisque le sous sol en craie de la région était propice pour avoir des caves à la température idéale.
Ce qui est le plus marquant quand on visite ce type de cave, c’est toute l’histoire qu’on peut voir avec ces murs. Ces galeries creusées depuis l’antiquité regorgent de détails qui donnent la même impression que lorsqu’on visite une grotte préhistorique, mais sur plusieurs périodes historiques.
Ces cheminées taillées dans la craie seraient attribuées aux Romains.
On retrouve ici quelques vestiges de l’ancienne église St-Nicaise de Reims avec des escaliers ou encore des portes et des voûtes.
Nous retrouvons aussi quelques signes du passé médiéval des Comtes de Champagne, avec ici une plaque montrant Thibaut 1er de Navarre, celui dont la légende raconte qu’il aurait ramené le cépage Chardonnay au cours des croisades (mais sa véritable origine a depuis été démontée, c’est un croisement entre le pinot noir N et le gouais B).
On découvre aussi d’autres vestiges datant de la 1ere Guerre Mondiale où les caves auraient été utilisées pour abriter des réfugiés et comme hôpital de fortune. Selon le producteur, plusieurs des graffitis qu’on retrouve gravés sur les murs seraient attribuables aux réfugiés de la Grande Guerre.
On retrouve aussi ça et là des galeries condamnées. Le réseau de tunnels en dessous de Reims est énorme, plus de 160km. Beaucoup ont été redécouverts à la suite de la 1ere Guerre Mondiale et des bombardements. Depuis, des galeries ont été condamnées et fermées (notamment à cause de risques d’effondrements), mais les différentes maisons de Champagne étaient connectées entre elles. Des caves de Taittinger, on pouvait donc aller à Pommery ou ailleurs.
Au final, c’est ce qui m’a le plus intéressé et marqué en visitant cette cave. Le procédé de fabrication du Champagne (si ça vous intéresse, allez à la fin de l’article), le fait que les crayères permettent d’avoir des caves à température constante, les galeries de bouteilles, tout ceci était déjà connu pour moi étant donné que j’ai déjà eu l’occasion d’en visiter et que je suis originaire de la région. Par contre, tout l’aspect historique autour est réellement fascinant !
Bonus : Comment le Champagne est-il produit ?
Le Champagne est un assemblage de 3 cépages : le chardonnay, le pinot noir et le meunier. Les pourcentages sont édictés par l’AOC, mais les producteurs peuvent plus ou moins varier pour donner un goût particulier à leurs vins.
La vinification du Champagne est par double fermentation. La première se déroule dans une cuve ouverte où le moût (les raisons pressés) fermente naturellement. Le premier vin obtenu n’est donc pas encore pétillant puisque tout le gaz s’est échappé. C’est lors de la mise en bouteille que le Champagne acquiert son côté effervescent où la seconde fermentation est cette-fois provoquée par l’ajout de la liqueur de tirage composée de vin et de sucres.
Les bouteilles sont ensuite placées sur les pupitres et sont régulièrement tournées (ce qu’on appelle le remuage). Lorsque les bouteilles sont tournées, leur inclinaison baisse progressivement pour que le goulot finisse par se retrouver en bas. Le but est de récupérer le dépôt qui se forme à la sortie de la bouteille.
Vient ensuite le moment du dégorgement où le goulot de la bouteille est refroidi à -25° pour geler le dépôt. Celui-ci est ensuite expulsé à l’ouverture de la bouteille qui possède une pression allant entre 6 et 8 bar. Selon les variantes, le liquide perdu est compensé par le rajout d’une liqueur ou non.
C’est à ce moment là que le fameux bouchon de liège et le muselet sont installés pour fermer la bouteille en vue de sa commercialisation. Puis elle est remise en vieillissement, à plat, pour une durée variant selon la variété et le millésime. Les bouteilles reçoivent leur étiquetage au moment de leur collecte de la cave pour leur mise sur le marché et livraison au détaillant.